Nous avons rencontré, mercredi 24 juillet, Victor Labat, coach des avants de l’US Saint Sulpicienne, qui avec force de conviction et détermination fait lutter cet « Astérix » rugbystique face aux légionsprofessionnelles. Focus sur un club et un coach qui dans le labeur, tentent de tracer son sillon en fédérale 1.
Victor Labat sous le maillot de l’USSS, avant qu’il ne passe de l’autre côté de la barrière / Crédit Photo DDM
Victor, vous êtes l’un des coaches d’une de ces équipes de rugby de clocher qui subsistent, l’US Saint-Sulpicienne, le club haut-garonnais qui fait souvent de la résistance face aux gros molosses de la Fédérale 1. L’année dernière, vous avez eu droit à une belle cerise sur le gâteau, c’est à dire une participation au Du Manoir. Cette année, une nouvelle poule, de nouveaux horizons. J’imagine que Saint-Sulpice va arriver dans cette poule 3 de Fédérale 1 pour être encore un peu l’équipe poil à gratter ?
Tout à fait, on va garder cette même logique. C’est à dire qu’à chaque saison, on essaie d’avoir une amélioration sportive et donc, une amélioration comptable. La saison prochaine, l’objectif sera effectivement la qualification. Dans quelle place, ça, peu nous importe, mais l’objectif sera de se qualifier la saison prochaine.
Pour un club comme Saint-Sulpice, on sait que vous n’avez pas des budgets extensibles. Quand on voit la course à l’armement que font Dijon, Narbonne, Cognac, Albi ou bien d’autres clubs, qu’est ce que ça vous inspire ?
Après, honnêtement, on regarde pas forcément ce qui se fait ailleurs. J’ai eu la chance de connaître en tant que joueur ces grosses structures. Les objectifs sont différents, on parle de villes déjà avec des moyens importants, avec des structures fortes, une agglomération urbaine vraiment différente de la notre. Aujourd’hui, nous, on travaille avec nos moyens, les autres avec les leurs. On est là pour jouer un peu les trouble-fête, pour continuer à rappeler qu’il existe d’autres rugbys que le rugby à forts moyens mais pour autant, qu’on est là et qu’on fera de la résistance à notre niveau.
Parce-que même si vous avez ambitionné le Du Manoir, on va dire qu’à Saint-Sulpice, vous vous rapprochez plus de ce qui se fait à Mauléon ou Oloron que de ce qui se fait à Albi ou à Blagnac. Ce sont quand même deux mondes qui se percutent. Quand vous préparez ce genre de match, quand vous préparez ce début de saison où vous allez avoir dans la poule Blagnac, Tarbes, Albi, j’imagine que ça doit quand même être un élément, un levier de motivation pour les joueurs d’essayer de faire tomber, chuter, ces goliaths ?
Oui, après, on se rend compte sur l’ensemble de nos saisons en Fédérale 1 qu’on a été capables de faire tomber certaines équipes comme Angoulême ou bien d’autres, chez nous. Aujourd’hui, on a la chance à Saint-Sulpice, on est quand même un club où on n’a pas vraiment le même statut que Mauléon ou autres, parce-que déjà, on est dans la large agglomération de Toulouse. On arrive quand même à conserver des joueurs qui sont sur la ville de Toulouse. Donc, ce n’est pas si compliqué que cela au final par rapport à d’autres qui sont dans des situations encore plus excentrées que nous.
En terme de recrutement, puisqu’on parlait d’attractivité, qu’est ce qui s’est passé un peu à Saint-Sulpice dans ce mercato ? Vous êtes partis sur une base que vous reconduisez puis vous avez rajouté de petites touches pour amener une plus-value ?
Alors, c’est assez différent par rapport à la saison dernière. On avait une équipe qui arrivait à maturité la saison dernière ce qui nous a permis de travailler avec un groupe assez uni et solidaire. Néanmoins, on avait une situation avec un groupe assez vieillissant, on avait aussi des joueurs de Toulouse avec des situations professionnelles ou autres qui les obligent aujourd’hui à se rapprocher de chez eux pour ces raisons. Donc, on va repartir avec un groupe qui est considérablement changé. Un nouvel entraîneur principal qui est Olivier Argentin, qui reviendra chez nous après une année de repos et un passage notamment à Lannemezan, Saint-Sulpice et Lombez. Damien Denechaud a choisi d’arrêter pour prendre un peu de recul et s’occuper de sa famille. On repart vraiment dans un nouveau cycle. Ces nouveaux joueurs, à eux d’écrire leur page. Une s’est fermée et j’espère que ce groupe travaillera dans la continuité sur un nouveau cycle et écrira son histoire.
Vous avez quelques noms à nous donner en terme de recrues ? Quelques têtes de gondole du recrutement de l’US Saint-Sulpicienne ?
Aujourd’hui, on a réussi à avoir des joueurs confirmés de Fédérale 1. On a notamment réussi à faire signer un joueur comme Pierre Jeudy qui nous arrive de Hyères-Carqueiranne après avoir fait quelques années en Pro D2 du côté d’Aurillac. On a beaucoup recruté sur des équipes espoirs, des joueurs qui n’ont pas forcément leurs chances dans des structures professionnelles ou dans les structures professionnelles de Fédérale 1. Pour autant, ce ne sont pas des mauvais joueurs donc nous, on va leur donner une chance de s’exprimer à notre niveau. Après, on a réussi à avoir quelques joueurs confirmés de Fédérale 1 comme le pilier Gagnidze qui nous arrive de Castanet et qui a pas mal bourlingué sur la division. L’objectif était vraiment pour nous de construire quelque chose de nouveau, un groupe considérablement rajeuni, un groupe élargi notamment au niveau de notre équipe espoir de façon à avoir une transition entre nos deux équipes, de façon à avoir une continuité sur le cycle, pas pour une saison mais pour plusieurs saisons.
Avec l’objectif de se pérenniser en Du Manoir, voire plus si affinités ?
Après, nous, on est conscients que toutes les saisons sont difficiles. On sait qu’aujourd’hui, on est capable de pérenniser notre club sur l’équipe fanion. Aujourd’hui, notre objectif est d’avoir une traçabilité jusqu’à notre école de rugby, jusqu’à nos cadets plutôt, de mettre en place un projet de jeu commun, de garder les valeurs sportives du clocher et d’alimenter notre équipe première avec des personnes qui vont être issues de la formation sur 3/4 saisons. Donc, voilà l’objectif que l’on a nous, au niveau du club de Saint-Sulpice sur Lèze.
On va parler un petit peu des poules. Elles sont tombées il y a quelques semaines. La poule 3 de Saint-Sulpice est une poule très axée, très centrée on va dire sur l’ancienne région Midi-Pyrénées. Ca vous convient comme tirage ?
Evidemment que c’est un tirage qui est extraordinaire. La première année, quand on est montés en Fédérale 1, je me souviens, j’étais joueur, on avait dû monter du côté de Vannes ou de Saint-Nazaire.
Ah oui, ça fait une trotte
Oui et pour des clubs à petits budgets, c’est un peu difficile. Aujourd’hui, on a une poule, déjà avec des clubs emblématiques comme Albi, Tarbes et j’en oublie peut-être. La chance qu’on a , c’est qu’on sait qu’on va jouer des derbys, notamment avec Pamiers, avec Lannemezan , avec Blagnac. C’est une valeur marchande qui est énorme parce-que ça va nous amener du monde au niveau du club, au niveau des matches à domicile mais on va pouvoir aussi se déplacer avec un public. Nous, on a quand même la chance d’avoir un public qui nous soutient même à l’extérieur. Là, recevoir Tarbes, c’est quelque chose d »énorme à Saint-Sulpice mais se déplacer à Tarbes ou à Albi avec notre public, ça l’est encore plus. Parce-que je sais qu’on aura leur soutien, et je ne vous cache pas que les trésoriers du club sont vraiment contents du tirage qu’on a eu.
Et puis, qui dit derbys dit toute la littérature, tout le petit folklore qu’il y a autour. Ca met un peu de piment, ça égaie une saison aussi ?
Ca égaye un peu. Après, bon moi, j’ai connu ce rugby, je pense que le rugby d’aujourd’hui a énormément évolué. C’est vrai qu’il y a toujours une rivalité mais les joueurs sont formés différemment aujourd’hui. J’ai envie de dire que ce sont plutôt les anciens qui se souviennent de ces guerres. Aujourd’hui, il y a une valeur, c’est plutôt par respect par rapport au maillot que l’on porte où on va s’investir plus sur une notion de derby. Maintenant, je pense que les joueurs ont tellement joué et appris tellement autre chose que les matches à domicile et les matches à l’extérieur, honnêtement, je ne pense pas que ça leur change leur quotidien quand ils vont jouer un derby.
Autre question, on change complètement de registre. Il y a une semaine, on avait Jérémy Wanin à notre micro et il nous disait que, chaque année, il y avait des surprises qui sortaient du chapeau. Je pense à Saint-Jean-de-Luz, à Dijon ou à Blagnac l’année dernière qui n’étaient pas obligatoirement prévus en début de saison pour faire le Jean-Prat. Et Jérémy Wanin vous citait à Saint-Sulpice sur Lèze parce-que vous aviez un peu fait trembler VRDR, vous citait comme équipe qui pourrait, en poule 3, venir jouer les trouble-fête. Vous vous inscrivez dans cet ordre là ?
Non, pas du tout, pas du tout, pas du tout. Honnêtement, aujourd’hui, on représente une ville de 1 800 habitants, on a un budget aux abords de 500 000€. Sur un match, on a la possibilité. La saison dernière, on a reçu Romans chez nous très tôt donc on a la possibilité de vite les prendre. On aurait pu faire un exploit et les battre d’entrée. Maintenant, on parle d’exploit. Les saisons sont tellement longues, tellement compliquées que, déjà, réitérer un peu le classement que l’on a fait, ça va être compliqué donc on va s’accrocher. Il y a une réalité qui est tellement économique, une réalité qui est tellement axée sur l’entraînement. Nous, on n’a pas de structure professionnelle, on a des joueurs qui s’entraînent deux fois collectivement plus une à deux fois individuellement dans les structures partenaires que l’on a. On ne peut pas comparer, non. Je pense que ça va être très compliqué. Comme toutes les saisons, on s’accrochera mais parler de nous pour autre chose, sur une saison complète, avec le budget que l’on a, il faut retomber à des choses très logiques et on ne serait pas à notre place à se qualifier 2e de poule avec 500 000€ de budget. C’est impossible.
En clair, pour conclure, vous allez continuer de faire ce que vous savez faire c’est à dire de l’huile de coude, être un peu le petit Astérix de la Fédérale 1 et aller chatouiller une fois en passant les gros et puis garder cet ADN de rugby de clocher ? On se souvient de Jean-Christophe Bacca qui parlait de Saint-Sulpice sur Lèze en disant : » Je me régale à aller là-bas. Il y a encore les papys avec les bérets et les cannes, c’est le rugby que j’aime. «
Exactement. Moi, c’est un rugby que j’ai découvert en tant que joueur sur ma fin de carrière, c’est un rugby qui m’a vraiment plu. A Saint-Sulpice ou ailleurs, il n’y a pas que nous qui savons être détenteur de ça. J’engage un maximum de personnes à connaître ce rugby, ce folklore. Maintenant oui, nous, on va continuer à s’accrocher, on va travailler et , comme je vous l’ai dit, notre club se structure toutes les saisons. Aujourd’hui, on est en train de structurer sur d’autres choses, sur la formation notamment. On essaie de s’inscrire sur une vallée au plus large, devenir un club vraiment représentatif de la vallée de la Lèze et du Volvestre même. Donc voilà, notre objectif, il est de continuer à faire évoluer notre club. Si par travail, on arrive à continuer et on aspire à peut-être mieux la saison prochaine il est vrai mais chaque chose en son temps et c’est à la fin qu’on verra où on est.
Merci Victor Labat et on notera que vous êtes un club de labeur et que vous comptez continuer à travailler pour vous inscrire durablement dans la Fédérale 1 et en Du Manoir.
Tout à fait, c’est exactement cela.
Propos recueillis par Loïc Colombié .
Publié par lemagsport
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